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jeudi 26 décembre 2013

La chronique économique : Un baril à 80 dollars ?

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Le Quotidien d'Oran, mercredi 25 décembre 2013
Akram Belkaïd, Paris
 
L’année 2014 verra-t-elle une inflexion majeure dans l’évolution du marché pétrolier telle qu’on la connaît depuis le début des années 2000 ? Alors que le baril de Brent reste accroché à un niveau proche de 110 dollars, quelques experts commencent à évoquer la piste d’un retour à une fourchette comprise entre 90 et 100 dollars. Certains, plus minoritaires, avancent même le seuil de 80 dollars. On le voit, ces prévisions vont à l’inverse de ce qui est communément admis, à savoir que l’or noir est destiné à atteindre 120 voire 130 dollars le baril en raison de la raréfaction des ressources pétrolières et du déclin continu des gisements existants.
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IRAK, IRAN, LIBYE ET… ETATS-UNIS
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En 2014, ce qui devrait pousser le marché à la baisse est la combinaison de plusieurs facteurs. Il y a d’abord le fait que la demande mondiale progresse lentement en raison de la faible croissance économique des principaux pays industrialisés. A l’inverse, la production globale risque fort d’augmenter du fait de la montée en puissance de plusieurs exportateurs.

Le premier d’entre eux est l’Iran qui ambitionne de retrouver au plus vite un niveau de pompage de l’ordre de 4 millions de barils par jour (mbj) maintenant que l’embargo sur ses ventes de pétrole a été levé. En effet, la perspective d’une suspension, même provisoire, des sanctions occidentales infligées à Téhéran dans le cadre du dossier sur le nucléaire est considérée par les opérateurs de marché comme susceptible de modifier l’équilibre pétrolier mondial.

Avec l’Iran, l’Irak pourrait être l’autre grand revenant sur le marché. Depuis plusieurs mois, Bagdad multiplie les efforts pour sécuriser ses champs pétroliers et convaincre les compagnies occidentales de reprendre leurs investissements hors du Kurdistan, seule zone de production considérée comme sûre. Dans le même temps, il est possible que l’or noir libyen soit aussi plus abondant sur le marché. On le sait, depuis la chute du régime de Kadhafi et la multiplication des milices, les exportations libyennes sont tombées à moins de 160.000 barils par jour contre 1,7 mbj précédemment. Enfin, il y a aussi le fait que les Etats-Unis sont plus que jamais des acteurs centraux du jeu pétrolier grâce à leurs réserves d’hydrocarbures de schiste. En 2013, l’Amérique a ainsi produit l’équivalent de 8 mbj et cela devrait être plus en 2014. Du coup, Washington devrait réduire ses importations, ce qui, mécaniquement, poussera les prix mondiaux à la baisse.

Bien entendu, et c’est là l’un des aspects caractéristiques du marché pétrolier, un scénario inverse à ce qui précède est tout aussi possible. Il suffirait pour cela que la Libye plonge encore plus dans le chaos ou que les sanctions contre l’Iran soient maintenues ou encore que l’Irak échoue à relancer sa production.

Autre possibilité : que l’industrie américaine du pétrole de schiste connaisse sa première crise avec l’éclatement de la bulle financière qui s’est constituée autour de ce secteur. En effet, de nombreux gisements sont encore loin d’être rentables et cela fait peser la menace d’une faillite sur de nombreux petits producteurs. Dès lors, les cartes du marché pétrolier seraient rebattues avec une diminution, même temporaire, de l’offre et d’un baril susceptible de revenir à 120 dollars.
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L’OPEP SUR LA DEFENSIVE
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Quoi qu’il en soit, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) ne peut ignorer le risque d’une forte baisse des prix. Début décembre, lors de sa réunion ministérielle, le Cartel a pourtant maintenu son plafond de production à 30 millions de barils/jour. Or, pour limiter l’impact de la hausse attendue de l’offre mondiale de brut, il faudra tôt ou tard que l’Organisation décide de réduire ses exportations, ce qui, pour être plus précis, signifiera que l’Arabie saoudite accepte de diminuer ses propres ventes d’or noir. Une perspective qui est loin d’être garantie. Il est possible alors que l’on reparle de la cohésion interne de l’Opep.
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